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Carnet de Sourcing Café : Ethiopie, Sidama & Woreda - Février 2023

Published 10.02.2023
Carnet de Sourcing Café : Ethiopie, Sidama & Woreda  - Février 2023

Éthiopie : Le début de l'histoire

Voilà 11 ans déjà, je découvris lÉthiopie et plus particulièrement le Wallaga, grâce à Jacques Chambrillon. Je rencontrais Shambe Kana, l’homme du Wallaga et rebelle Oromo, puis la douceur et la beauté des forêts caféières. 

11 ans après, Terres de Café importe plusieurs containers de cafés de forêts, de plusieurs régions éthiopiennes. C’était un rituel de s’y rendre chaque année pour lier des amitiés et des relations d’affaires avec nos différents partenaires. Ce pays et ses cafés merveilleux sont dans l’ADN de Terres de Café. 

Mais l’Éthiopie nous a été confisquée depuis trois ans par une guerre civile ou plutôt ethnique, dont nous ne parlons que très peu en Europe mais qui a déjà fait plus de 600 000 morts dans le Nord, dont la moitié sont des civils. 
Les cafés nous parvenaient en fonction de certaines régions mais les relations étaient devenues impossibles. 

C’est donc avec une joie particulière que je prépare ce voyage, que je vais partager avec Michael Loos, notre torréfacteur, Romain Alimoradian, le propriétaire de la boutique Terres de Café de la rue Le Bourdonnais, mon complice de toujours et photographe Fabrice Leseigneur et Jacques Chambrillon qui sera également du voyage. Pierre de Chanterac nous rejoindra également, il vient de gagner la compétition nationale d’Ibrik (café turc) SCA, avec un café d’Éthiopie Honey Process préparé par les frères Dukale. Cela tombe bien, ce sont eux que nous allons rencontrer !

 Pierre de Chantérac et les frères Dukale | Crédit photo : Fabrice Leseigneur 

Les frères Dukale - Sidama et Woreda

Atterrissage à Addis Abeba, transfert aérien pour Hawassa, et nous voici en région Sidama. Shambe nous attend, il n’a pas changé, retrouvailles émouvantes. Il est accompagné de Assafa Dukale. Nous montons dans les 4X4 et c’est partie pour 8 jours de découvertes. 

Le premier objectif de ce voyage est de diversifier nos approvisionnements en cafés d’Éthiopie, et pour cela, faire connaissance avec les frères Dukale, qui opèrent dans deux régions : Sidama et Woreda.
Le second objectif est d’échanger sur les différentes manières de conduire les fermentations afin de hisser si possible ces cafés sur le devant de la scène du café de spécialité, qui est une des meilleures façons d’en faire la promotion. 

Les cafés d’Éthiopie restent la priorité de Terres de Café 

Les Sidama, et plus particulièrement les cafés issus de la zone de Bensa jouissent d’une notoriété internationale. Ils gagnent sans partage les Cup Of Excellence* Éthiopie (compétition nationale des meilleurs cafés de chaque pays producteur) de ces dernières années. 

A Bensa, les Dukale sont chez eux, ils y sont nés et ont hérité des affaires caféières de leur père et d’infrastructures qui leur permettaient d’exporter 200 containers (1 container = 300 sacs de 60kg) de cafés commerciaux par an !
Mais les temps ont changé et les frères Dukale ont largement réduit la voilure. 25 containers en 2022, en faisant désormais des cafés de spécialité de haute qualité. Un container de café de spécialité leur rapporte autant que cinq containers de cafés commerciaux. Ils sont en cours de réorganisation totale pour optimiser leur production et exportations de cafés à haute valeur ajoutée.

Sashamo Dukale, le plus jeune des frères, qui gère le terrain et les fermentations nous a rejoint. Nous arrivons sur zone de production et visitons une station de séchage spécialisée dans les cafés natures et une station de lavage / séchage où sont traités les cafés lavés, Honey Process et anaérobiques. Puis nous allons visiter quelques fermes dans les villages de Alo et Bombe.

Ferme en Éthiopie | Crédit photo : Fabrice Leseigneur 

Immersion dans la vie éthiopienne 

Ici, la production de cerises est effectuée par des milliers de petits producteurs qui produisent en polyculture sur des surfaces allant d’un demi-hectare à cinq hectares. Une culture en agroforesterie sans intrants. Sous la pression démographique et le changement climatique, les familles vont de plus en plus haut pour s’installer, coupent les arbres et organisent une paysannerie vivrière et marchande. Ils y cultivent l’Ensat, base de l’alimentation, les légumes, les fruits, un peu de bétail et de volailles pour certains, et partout du café.

Les familles consomment ce qu’elles produisent, et vendent les surplus. Le café est en revanche une culture de rente et constitue la principale source de revenu des paysans agriculteurs. Plus de forêts malheureusement, mais un paysage de parcelles boisées, loin de l’agrobusiness et des intrants chimiques. Ils y cultivent le café désormais jusqu’à 2300 mètres d’altitude.

Quant aux Dukale, ils travaillent avec environ 800 fermes, achètent les cerises sur des points de collecte et les acheminent dans leurs stations de séchage en fonction de la méthode de fermentation choisie pour le lot. Une fois les cafés séchés, ils partent dans leur station de triage à Bensa, puis dans celle de Adis Abeba pour les cafés destinés à l’export. Ils maîtrisent ainsi toute la ligne de production, de la collecte à la mise en sacs.

Ils gagnent sans partage les Cup Of Excellence Éthiopie de ces dernières années.

Avec 10 ans d’expériences en fermentation, et des moyens structurels hérités du négoce commercial, les Dukale sont capables aujourd’hui de rivaliser avec les meilleures fermes latino-américaines, de travailler des volumes et disposent d’une matière première exceptionnelle issu de l’incomparable terroir éthiopien. Ce n’est pas un hasard si nous avons remporté l’Ibrik avec un de leur café, et que nous voulons développer un partenariat d’ampleur avec eux.  

Nous avons passé pas mal de temps sur leur station de Shantawene, où sont produit les cafés en fermentation anaérobique. Nous avons procédé à des tests de process spéciaux que Pierre de Chanterac a pu connaître chez Finca Josefina et chez Finca La Soledad en Équateur. Le but étant de gagner encore en qualité en tasse et continuer de gagner des compétitions avec ces fabuleux cafés. Nous pourrons goûter ces tests d’ici quelques semaines. A suivre.

Pierre de Chantérac | Crédit photo : Fabrice Leseigneur 

La fin d'un voyage

Nous avons ensuite fait une incursion en Woreda, et plus particulièrement en zone Gedeo Yirgacheffe, où les Dukake opèrent aussi au travers de 3 stations réparties dans les villages de Garse, Idido et Layu, qui délivrent parmi les plus beaux Yirgacheffe.

Ici c’est le même type d’agriculture mais avec une production de café installée de plus longue date. Les arbres sont plus vieux, plus grand et le sentiment de se situer sous forêt renaît quelque peu. Cela donne cependant l’idée de ce à quoi ressemblera la zone de Bensa d’ici 20 ans.
Nous avons pu goûter quelques cafés, ils sont sublimes et l’un d’entre eux entrera dans notre gamme 2023/2024.

Ce pays et ses cafés merveilleux sont dans l’ADN de Terres de Café.

C’est presque la fin du voyage, dans une Éthiopie autoritaire, tendue, peuplée, jeune et pauvre. Il faudra du temps pour que le pays se remette de cette guerre. Mais le café n’a jamais été aussi bon et les producteurs exportateurs surfent déjà sur la vague du café de spécialité qui demande toujours plus de café de haute qualité achetés à prix élevé.

Le café est un des principaux atouts dont dispose l’Éthiopie pour participer au rééquilibrage de sa balance commerciale si déficitaire, et à l’amélioration des conditions de vie des Éthiopiens.
Les cafés d’Éthiopie restent la priorité de Terres de Café et si nous pouvons contribuer à notre petite échelle au retour du progrès social et économique dans ce merveilleux pays, notre démarche n’en aura que plus de sens.

Février 2023

C. Servell.