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CARNET DE SOURCING CAFÉ : VOLCAN AZUL, COSTA RICA - FÉVRIER 2022

Published 22.04.2022
CARNET DE SOURCING CAFÉ : VOLCAN AZUL, COSTA RICA - FÉVRIER 2022

«  Je m’attendais bien sûr à en prendre plein les yeux. Tous les professionnels du café qui y sont passés me le disent : c’est l’une des plus belles fermes du monde.

Après avoir découvert le berceau de l’Arabica et ses caféiers sauvages en Éthiopie, qu’attendre d’un voyage « à l’origine » au Costa Rica ?

C’est en songeant à tout cela que je m’envole pour Volcan Azul, où je vais passer 7 jours à accompagner ce fermier, Alejo Castro, partout dans sa ferme.

 

UNE EXPÉRIENCE RARE

 

Bien qu’Alejo ait coutume d’y accueillir des visiteurs qui viennent des quatre coins du monde toute l’année, ce type de long séjour est peu fréquent.

En effet, la majorité des acheteurs qui lui rendent visite (torréfacteurs / importateurs) ne restent, en fait, que quelques jours. Faute de temps, par nécessité de prendre la route à nouveau pour aller découvrir d’autres fermes, goûter d’autres cafés et ainsi rentabiliser leur si long voyage.

 

"En terme d’innovation, de qualité, d’engagement environnemental et social, Volcan Azul fait figure d’exemple en Amérique Centrale."



Christophe (Servell) a bien sûr passé plusieurs semaines cumulées ici, à Volcan Azul, mais cette fois-ci, il part le lendemain de notre arrivée, pour explorer la côte avec Romain (Terres de Café la Bourdonnais), avant de s’envoler deux jours plus tard pour le Salvador, rejoindre l’autre partie de l’équipe. Quant à moi, je reste 6 jours de plus avec Alejo.

Il est une chose que de visiter une ferme, soit le plus souvent : marcher au milieu des caféiers et examiner la biodiversité / s’enquérir de l’aspect social / inspecter les wet et dry mill / cupper une à deux tables ; il en est une autre que de passer plusieurs jours seul en immersion totale dans le quotidien d’un fermier.

En 7 jours, j’ai pu arpenter la ferme, assister la cueillette, participer aux process de fermentations et cupper pas moins de 60 cafés fraichement sortis de séchoir.

 

Alejo Castro en compagnie de Pierre de Chantérac

Mais surtout, ce séjour m’a permis d’appréhender la complexité de la réalité de Volcan Azul, et d’y mesurer le travail engagé. Nous avons bénéficié -Alejo et moi- de l’espace suffisant pour échanger en profondeur sur les pratiques agricoles, les variétés, les fermentations innovantes, les compétitions, les défis, et l’évolution du marché à venir ; en bref, prendre le temps nécessaire à de beaux échanges, et renforcer plus encore le sens et la pérennité de notre partenariat. C’est le fruit de ces échanges que je vais tenter de vous raconter dans ce témoignage.

En terme d’innovation, de qualité, d’engagement environnemental et social, Volcan Azul fait figure d’exemple en Amérique Centrale.

 

Une ferme en constante réinvention

 

Avec 200 ans d’histoire dans le café, Alejo s’inscrit dans une famille de pionniers de la caféiculture au Costa Rica. Son père fit l’acquisition de Volcan Azul dans les années 90, et c’est en 2012 qu’Alejo en prend le management. S’il espère faire prospérer le fruit du travail des membres de sa famille, qui, jusqu’à aujourd’hui, se sont battus pour ériger ce qui existe, il ressent l’envie de fixer un nouveau cap.

Jusqu’alors, la production de café de spécialité repose essentiellement sur la qualité des cerises et leur récolte à pleine maturité, leur tri soigneux, puis leur traitement par voie humide (fruits dépulpés, grains lavés puis séchés).

Ce choix de process permet un traitement rapide des cerises (la parche sèche plus rapidement qu’une cerise entière) et offre une grande régularité et homogénéité des lots.

Les variétés cultivées alors, au nombre de trois, sont le Caturra (mutation naturelle de Bourbon, découverte au Brésil), le Catuai (croisement entre Mundo Novo / Caturra) et le Costa Rica 95 (croisement entre Hybride de Timor / Caturra). Ces variétés sont communément trouvées au Costa Rica, offrent de bons rendements et un profil de tasse satisfaisant à très satisfaisant.

crédit photo : Jean-Baptiste Murcia

En 2012, Alejo commence par planter de nouvelles variétés, certaines jusqu’alors quasi absentes du Costa Rica : Geisha, SL28 kenyan, Typica. Plus tard, il plantera du Bourbon Pointu, du San Ramon, du San Isidro, etc.

À ce jour, on dénombre plus de 40 variétés différentes cultivées au sein de Volcan Azul.

Cette stratégie de diversification représente à la fois un investissement et un risque conséquents.

Alejo acquiert des graines, qu’il confie ensuite à une nurserie, et récupère au terme d’une année des plants prêts à être mis en terre. Il peut espérer, en fonction des variétés, une première récolte au bout de 3 à 4 ans. Seulement là, peut-il choisir de développer à plus large échelle la culture d’une variété dont le profil lui plaît. Ce sont donc encore 4 années supplémentaires qu’il lui faut attendre, avant d’obtenir une récolte réellement conséquente.

Ce choix de la multiplicité engendre des modifications importantes dans les modes de culture et les process post récolte.

Premièrement, cela implique une parcellisation stricte de chaque variété.

Chacune peut s’épanouir pleinement à une certaine altitude, un certain degré d’exposition au soleil ou aux vents, qu’il convient de respecter au mieux afin d’obtenir des arbres sains, à la production constante année après année.

 

"À ce jour, on dénombre plus de 40 variétés différentes cultivées au sein de Volcan Azul."



Lors de la récolte, alors qu’une grande partie des cerises atteint sa maturité en même temps, cela pose un défi d’organisation pour récolter puis processer (wet mill) chaque parcelle indépendamment.

Consécutivement, au dry mill, cela implique de nettoyer méticuleusement chaque machine (déparcheuse, table densimétrique, crible, machine à tri colorimétrique) entre chaque nano-lot.

 

Pour aller un peu plus loin, enfin, au sein même des variétés cultivées à Volcan Azul, se cachent plusieurs lignées (graines provenant de différentes acquisitions) différenciées par leur zone de culture. À titre d’exemple, à ce jour 10 lignées de geisha sont présentes sur la ferme, dont 4 cultivées à plus large échelle.

De ce fait, chaque lot à Volcan Azul est véritablement unique.

Ce travail rigoureux permet aujourd’hui autant d’expressions différentes d’un même terroir.

Pour autant, la volonté d’innovation et de quête d’excellence à la ferme se concrétise visuellement par un autre levier pendant la période de récolte : les procédés de fermentation innovants.`

 

Diversité des méthodes de fermentation

 

Les premiers essais de honey process (cerise dépulpée mécaniquement puis parche mise à sécher sans lavage préalable) sont effectués en 2013. Les premiers traitement par voie naturelle ou sèche (séchage directement en cerise entière) arrivent en 2014.

Aujourd’hui, l’essentiel des micro-lots (+85pts) et nano-lots (+88pts) sont réalisés en Honey Process ou Nature, les lavés étant devenus des exceptions.

Seul les plus petits lots sont encore majoritairement traités par voie humide, dans un soucis de constance, d’homogénéité et de maîtrise des coûts.

Lorsque nous avons commencé à acheter des cafés à Volcan Azul, en 2017, la majorité des nano-lots étaient traités en honey process, geishas y compris. Depuis, année après année, Alejo pousse davantage ses fermentations, privilégiant les cafés natures aux honey process plus délicats. Cette évolution le pousse en 2019 à réaliser ses premiers essais de fermentation en anaérobie*. (*absence d’oxygène ; soit dans le cadre d’une fermentation, les cerises placées dans des tanks scellés hermétiquement avec pour seule sortie un flotteur, empêchant l’oxygène externe de rentrer tout en permettant à l’oxygène contenu en interne d’être graduellement chassé par le Co2 produit lors de la fermentation, pour arriver à un milieu quasiment anaérobique).

crédit photo : Jean-Baptiste Murcia

Depuis, ces essais de fermentation se sont transformés en un véritable succès. Chaque année, Alejo produit des dizaines de lots en partant d’une même variété, voir d’une même lignée au sein d’une variété, en modulant les profils de fermentation (lavé, yellow honey, red honey, nature, anaérobique, anaérobique chaude, etc.)

Depuis 2020, il explore un nouveau process, mis au point par itération : la double fermentation. Ce process en aérobie (présence d’oxygène) permet de délivrer des cafés avec une intensité remarquable et des attributs pâtissiers prononcés. Nous sommes d’ailleurs tombés amoureux de deux cafés ayant subits ce process, que nous avons hâte de proposer pour l’année 2021/2022 : un caturra Double Fermentation, ainsi qu’un Typica Lima somptueux.

 

Préserver et façonner un écosystème résiliant

 

En pilier de toutes ces bonnes pratiques de transformation, la famille d’Alejo a de tout temps toujours pris soin de préserver la biodiversité sur ses terres. À titre d’exemple, Volcan Azul, ce sont 70 hectares de caféiers, et 220 hectares de forêt de conservation. 

L’une des actions récente qui l’illustre fut la plantation en deux ans de plus de deux milles arbres en bordure des caféiers, pour limiter les dommages causés par les vents violents qui sévissent dans la région, et limiter la propagation des maladies. Cette action permet conséquemment l’usage de plus en plus mesuré de traitements fongicides, qui s’additione à l’abandon, depuis plusieurs années déjà, de tout produit insecticide.

 

"Volcan Azul s’inscrit dans cette logique de durabilité environnementale et d’engagement vers la qualité, voir l’excellence."



L’une des autres clés utilisée par Alejo pour s’affranchir graduellement des intrants phytosanitaires est le recours à des variétés plus résistantes, comme le San Isidro (hybride Villa Sarchi / Timor), ou l’hybride H1 (hybride sarchimor / Sudan Rume). Ces variétés offrent de meilleures résistances aux maladies communes (CBD, rouille) tout en produisant des rendements élevés et constants chaque année.

Ces stratégies font écho aux méthodes modernes d’agriculture responsable, qui privilégient l’usage de variétés résistantes couplées à l’abandon d’intrants phytosanitaires, plutôt qu’à toute forme de béquille physique ou chimique.

En somme, il ne fût pas trop d’une semaine pour aborder ces questions complexes, notamment de durabilité. Il serait plus simple que Volcan Azul soit totalement en agriculture biologique, mais l’humidité permanente de cette région (altitude moyenne, beaucoup de pluie), le besoin de rendement (pour compenser notamment une main d’œuvre au coût plus élevé que dans la majorité des pays d’Amérique Centrale) et donc l’espacement des caféiers parfois insuffisants, sont autant de facteurs favorables au déploiement des maladies du café, décimant des récoltes entières.

Volcan Azul s’inscrit dans cette logique de durabilité environnementale et d’engagement vers la qualité, voir l’excellence.

C’est en ce sens que nous sommes fiers de promouvoir et de faire perdurer cette relation privilégiée de partenaires, construit au fil des années, entre Volcan Azul et Terres de Café, et que nous sommes impatients de partager avec vous tous les merveilleux lots que nous avons sélectionnés année.

Comme chaque année, une nouvelle récolte est un grand moment d’excitation, de découverte et de retrouvaille.

 

Pierre de Chantérac